La sclérose en plaques aux Antilles

Alors que les Antilles semblaient épargnées, la sclérose en plaques y a émergé depuis le début des années 90, ce qui attesterait d’une extension progressive de la SEP à toutes les latitudes et à toutes les populations.

Une progression qui s’est accélérée
« La population antillaise est constituée à 95% d’antillais d’origine africaine » (Vilmarest, 2018). Fin 1998, la prévalence SEP était de 17,4 pour 100.000 parmi les Martiniquais afro-caribéens.
Mais, selon l’ « Association caribéenne de sclérose en plaques Madin’sep », en 2006 la Martinique comptait 390 personnes déclarées atteintes de sclérose en plaques pour une population d’environ 400.000 habitants. Dix ans plus tard, elles étaient 1 200 et seraient 1 500 en 2018. La prévalence aurait ainsi bondi de 97 à 375 pour 100000 en seulement 12 ans, ce qui est très exceptionnel à une telle latitude (mais selon l’association, Haïti serait même plus touchée).
L’Agence Régionale de Santé (ARS) de Martinique affirme ainsi que :

Carte des Antilles françaises
Carte des Antilles françaises

La SEP ne doit plus être considérée comme un diagnostic d’exception chez un sujet originaire des Antilles françaises.Plan Maladies Neuro-dégénératives 2014-2019 – Plan d’action Martinique – 10 oct. 2016

Quant à l’incidence, c’est-à-dire le nombre de nouveaux cas par an, elle était estimé pour la période 1992 – 2007, selon les différentes sources, à 1,68 pour 100.000 en Martinique et 0,7 en Guadeloupe par Agnès Fromont dans s la thèse de doctorat sur l’épidémiologie de la sclérose en plaques en France, mais à 1,27 par l’ARS de La Martinique qui précise surtout dans le même document de 2016 :

« En regroupant les informations, les neurologues s’accordent sur le chiffre d’environ 80 nouveaux cas de SEP par an en région Martinique. »

Principalement les femmes d’abord
La sclérose en plaques touche davantage les femmes que les hommes, avec un ratio de trois femmes pour un homme. Mais son émergence aux Antilles a été marquée dans les années 90 par un ratio de plus de 8 femmes pour un homme (Philippe Carde, La SEP dans les Antilles, 2008) puis a chuté régulièrement pour atteindre un ratio d’incidence de 2,67, plus classique, dans les années 2000.

Les facteurs en jeu
La Martinique est davantage touchée par la Sep que la Guadeloupe. Or, il y a eu dans les années 60 une importante vague de migration depuis les Antilles vers la métropole, y compris d’antillais de moins de 15 ans, via notamment le Buradom…
Dès le début des années 80 – peut-être par désenchantement dû aux conditions de travail, d’intégration et de vie – les retours vers La Martinique ont été importants et, dans une moindre mesure, vers La Guadeloupe. Gilles Defer et Marc Debouverie indiquent :

En 1999, cela représentait 36,6% de la population de Martinique et 28,1% en Guadeloupe.

La sclérose en plaques – Historique, épidémiologie et pathogénie, pp 45-46

Les données de prévalence et d’incidence montrent que la Sep est bien plus fréquente chez les migrants ; le risque serait multiplié par 4, selon l’ARS, pour ceux qui avaient migré vers la Métropole avant l’âge de 15 ans et qui n’ont pas pu bénéficier des facteurs protecteurs de leur lieu de naissance, ensoleillement et même certaines infections parasitaires, semble-t-il :

Il existe une corrélation étroite entre la diminution de la prévalence des parasitoses intestinales (principalement représentées par la Schistosomiase à Schistosoma Mansoni) (91)et l’émergence de pathologies auto-immunes associées à une réponse immunitaire de type TH1. En effet, l’éradication des helminthiases intestinales par une amélioration des conditions d’hygiène a supprimé l’action protectrice du parasite qui induit chez l’hôte une réaction immunitaire de type TH2 au détriment de la réaction immunitaire TH1 (92), devenant un facteur-clé de l’émergence de la SEP aux AF.

Évolution de la sclérose en plaques chez les Antillais d’outre-mer et de Métropole Aymeric de Vilmarest, 2018, p35
https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-02076068/document

Une Sep plus agressive ?
Enfin, les auteurs estiment qu’il y a bien une susceptibilité génétique, mais elle se fonderait sur des traits génétiques (‘allèles’) hérités de l’Afrique différents de ceux de la population d’origine européenne.
L’ARS note que « La SEP présente aux Antilles françaises une agressivité plus importante que dans les populations Caucasiennes », comme l’analysent aussi les chercheurs qui se sont intéressés à la sclérose en plaques en Afrique.

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Association caribéenne de sclérose en plaques Madin’sep
14, rue des Pêcheurs, Anse-à-l’Ane
97229
Les Trois-Ilets

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